Michel MANNEVY, enfant de Curtil St Seine, nous a fait partager ses sentiments sur la forêt de Val-Suzon qu’il connaît parfaitement bien. Michel MANNEVY a reçu sa formation à l’école forestière de CROGNY (Aube) de 1964 à 1966. A sa sortie il a été nommé Agent Technique stagiaire au poste de Frôlois. Passé Chef de District en 1973 il fera l’essentiel de se carrière à Chanceaux pour terminer comme Chef Technicien de l’Office National des Forêts le 30 juin 2006 et prendre sa retraite à Curtil St Seine.
Curtil Saint Seine, souvenez vous, c’est ce village qui a connu l’impensable et important incendie de forêt. C’était en juillet 1984 les habitants se sont mobilisés d‘urgence pour aller combattre un imposant feu de forêt dans la forêt domaniale de Val-Suzon. Feu qui menaçait par ailleurs les proches récoltes de blé et autres. Quelle ne fut pas leur surprise de découvrir que l’auteur de cet incendie n’était autre que l’Ingénieur forestier. Monsieur l’Ingénieur qui avait fait pratiquer une coupe à blanc entendait détruire par le feu les andains de rémanents, provoquant du même coup, en plein mois de juillet, s’il vous plait, un spectacle hallucinant. C’était l’époque où l’O.N.F. préconisait les coupes à blanc. Alors que de nos jours, à l’inverse, dans les taillis sous futaie, les exploitations ne sont même plus souhaitées. Une contradiction édifiante sur la politique forestière de l’Etablissement Public, à caractère industriel et commercial, de l’O.N.F. Lequel est confronté à la rude épreuve des lois du marché, face aux industriels du bois. Rigueur qui n’en a que faire des règles prescrites par l’aménagement forestier, arrêté pour chaque massif, en vue de sa conservation et de son évolution.
Le bois de chauffage, de nos taillis sous futaie, ne trouvent plus preneurs. Alors pour sauver la face on a lancé des appellations, largement développées du style : « forêt de protection », « réserve naturelle », « site d’exception » cherchant ainsi à masquer les réalités. Aujourd’hui, si la forêt souffre et le bois tombe de vieillesse, la faute en est imputée « au réchauffement climatique ». Alors que l’on devrait, en bonne conscience forestière, commencer par s’interroger pour savoir si, tout au contraire, les taillis sous futaie trop vieillissants ne précipitent pas ce réchauffement. La forêt ne devrait-elle pas être « soignée » au mieux, pour lui permettre de combattre le réchauffement avec un maximum d’efficacité ? Sauf que l’Office National des Forêts n’a pas les moyens de s’offrir une application respectueuse de l’aménagement dans chaque massif forestier. Dès lors la situation de nos forêts en est devenue catastrophique. D’ailleurs l’O.N.F. est officiellement à la recherche de nouvelles ressources auprès des Communes Forestières. Une prévision d’augmentation de près de 30 millions va leur être imposée sur les 3 ans à venir et environ 300 emplois seront dans le même temps supprimés. Cette imposition de gestion des forêts communales par l’Etat, qui s’appelait avant la réforme de 1964 « le vingtième forestier » pourra bientôt s’appeler : « le 5 ème forestier ». Cette taxe de gestion s’applique sur toutes les recettes – bois, chasse, etc, en provenance de la forêt communale du lieu.
Pour l’Office National des Forêts, après l’échec forestier c’est un lamentable échec financier. Dès 1964, tous les avertissements avaient pourtant été annoncés aux hommes politiques. Personne n’a voulu les entendre, prétextant le passage d’une gestion de protection à une gestion tournée vers la production. Les dommages financiers sont graves mais bien davantage encore sont ceux portés à la forêt.
Georges BALLIOT
LA VIGIE CITOYENNE.